TELL ME YOUR DREAM

Vous n’êtes peut-être pas familiers de la civilisation Inca, et franchement, qui pourrait vous blamer de ne pas connaitre ces illuminés adorateurs du soleil, disparus depuis maintenant des centaines d’années ? Seulement, voilà, l’histoire de Savannah, c’est l’histoire d’une Inca.
Au sein de ce peuple, il y avait une hiérarchie pré-établie. Au sommet de celle-ci, on trouvait les empereurs, les Sapa Inca, les Fils du Soleil. Ceux-ci choisissaient pour femmes des Aclla. Ah, les Aclla. Etymologiquement, Aclla signifie « femme choisie ». Ces Vierges de Soleil étaient choisies dès leur plus tendre enfance par les prêtres Inca et vivaient alors recluses dans des couvents pour mieux y adorer le Dieu Soleil. Puis, une fois leur éducation spirituelle terminée au sein du couvent, les Empereurs Inca épousaient les plus belles d’entre elles. Pour mieux les sacrifier par la suite au cours de rituels particulièrement sanglants, les donnant en offrande au Dieu Soleil, sous les hurlements extatiques de foules d’adorateurs solaires en délire. De braves petits, ces Incas. Ils avaient le sens de la fête, eux.
Seulement voilà, toutes les bonnes choses ont une fin. L'empire inca fut conquis par les conquistadores espagnols sous les ordres de Francisco Pizarro à partir de 1532. C’en était fini de cette grande civilisation. Alors que les foules tournaient peu à peu le dos au Dieu Soleil et étaient convertis au catholicisme, il ne resta bientôt que le dernier Empereur Inca et sa concubine. Ils n’avaient plus personne à gouverner mais restèrent fidèles à leurs croyances. Ils enfantèrent, et eurent une petite fille. Une pure Aclla, une Vierge du Soleil. Ils voyaient en elle le moyen de sauver leur civilisation, de la ramener à son prestige d’antan. Seulement, il fallait une arme à cette petite suffisamment puissante pour faire plier les autres peuples. Ils façonnèrent alors un médaillon, pour lequel ils finirent par se sacrifier, faisant ainsi la preuve de leur foi sans limite. Le Dieu Soleil, touché par cette ultime offrande, toucha le médaillon de sa grâce divine et le dota du pouvoir solaire. Il incomba alors à l’enfant de le porter, et de le transmettre de génération en génération. Avec ce médaillon, ces descendantes d’Aclla avaient la difficile mission de faire renaitre la civilisation Inca de ces cendres…

Des centaines d’années plus tard, une petite fille nommée Savannah vivait une enfance tranquille. Jusqu’à ce qu’elle ait 12 ans, du moins. Car à son anniversaire, sa mère lui fit le cadeau d’un médaillon poussiéreux que la gamine trouva hideux au premier abord. Ce ne fut qu’en l’enfilant qu’elle réalisa la puissance qui s’était mise à couler dans ses veines. Elle se mit à irradier pendant plusieurs minutes. Elle brillait littéralement par tous les pores de sa peau, véritable petite luciole qu’elle était devenue. Sa mère lui expliqua que ce médaillon se transmettait de mères en filles depuis maintenant des siècles, et lui conta la manière dont elles étaient censées faire renaitre les Incas grâce aux pouvoirs qui leur étaient accordés. Parce que oui, ce médaillon conférait à celle qui le portait des capacités hors du commun. Il faisait pulser dans les veines de l’Aclla toute l’énergie du soleil, ce qui la rendait plus vive d’esprit, puis dynamique. Celles qui le portaient ne tombaient jamais malades, guérissaient plus vite en cas de blessures, avaient besoin de moins de nourriture et de moins de sommeil. Et puis, surtout, elles avaient le Pouvoir Illuminé. Il faut comprendre par là qu’elles se mettaient à briller, à irradier la lumière ardente du Dieu Soleil. Et qu’en de rares occasions, elles pouvaient canaliser cette lumière dans la paume de leurs mains, ce qui leur permettait de projeter des sphères d’énergie lumineuse.

Les années passèrent, et Savannah fut élevée dans la plus pure tradition Aclla. A tel point qu’elle se mit à son tour à adorer le Dieu Soleil et à adhérer à ses préceptes. A 18 ans, elle partit à la conquête du monde, prête à faire plier toutes ses âmes faibles, à les convertir à sa religion. Seulement voilà. En des temps où les religions subissent un recul phénoménal et où les seuls cultes voués par les hommes se font envers les célébrités et les sportifs, imposer la religion Inca fut chose impossible. Surtout quand plus personne ne tremble devant vos pouvoirs, à cause de l’existence des autres super-héros. De nos jours, si vous vous mettez à briller dans un centre commercial bondé en hurlant que le Dieu Soleil balayera tous les esprits corrompus qui refusent de se soumettre à lui, on vous pointe du doigt et éclate de rire. Et puis un super-héros débarque et vous embarque pour trouble à l’ordre public. Savannah en fit la douloureuse expérience pendant plusieurs années d’errance à travers le monde.

Il lui restait donc la solution de devenir une super-héroïne. Seulement, bon, combattre le crime quand votre principal capacité consiste à briller dans le noir comme une vulgaire lampe torche, excusez-moi mais ce n’est pas ce qui impose le plus le respect, à première vue. Sa carrière de super-héroïne fut donc de très courte durée, et elle n’atteint jamais une quelconque notoriété tant elle était mauvaise. Même son pseudonyme était ridicule : elle s’était d’abord autoproclamée Aclla Vengeresse, mais personne ne comprenait, alors elle avait opté pour un nom dans la plus pure tradition des super-héros, à savoir Sunlight Princess. Encore un échec cuisant pour cette barbie complètement déphasée.

Et puis, un jour, elle entendit parler d’une école spéciale, celle des super-héros de demain. Shadow of Hope. Elle eut le déclic, et se découvrit une vocation. Si elle-même n’était bonne à rien, elle n’en restait pas moins pédagogue. L’enseignement, ça l’avait toujours botté. Elle fit ses valises et s’empressa d’aller se faire engager là bas, en tant que professeur. Et étrangement, malgré son côté complètement à la masse et sa personnalité illuminée, elle fut embauchée. La voilà donc enseignante, elle qui porte sur ses frêles épaules l’impossible mission divine de ramener les Incas à l’apogée de leur civilisation.

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